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Les pilotes de l'estuaire

 De l'embouchure de la Gironde à Bordeaux, 25 pilotes guident les navires jusqu'aux ports qui longent l'estuaire. Depuis fin 1997, la décision d'orienter au radar certains bateaux, à partir du centre de pilotage du Verdon, divise la profession.

 12 juillet, 15h56. A l'heure où la France se prépare à vivre la plus grande soirée de l'histoire du football français, Alain Lejeune, 51 ans, pilote de l'estuaire depuis 18 ans, embarque sur la vedette Nina, au port du Verdon. Conduit par Alain Lapeyre, le capitaine de la vedette, Alain Lejeune va remonter l'estuaire jusqu'à l'embouchure de la Gironde, où il embarquera sur un bateau commercial polonais de 200 mètres de long, le General Jasinski.

Le navire, construit en 1974 en Bulgarie, a chargé 31 362 tonnes de soja dans le port de Santos, au Brésil, et a passé 18 jours en mer avant d'atteindre la bouée Bx a (Bordeaux atterrissage), à quelque 25 kilomètres à l'ouest du phare de Cordouan. C'est la limite que les bateaux de plus de 100 m ne sont pas autorisés à dépasser sans un pilote, dont le rôle est de les conduire vers l'un des ports qui longent l'estuaire : Le Verdon, Pauillac, Blaye, Le Bec-d'Ambès, ou Bassens.

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Le General Jasinski remonte l'estuaire de l'embouchure de la Gironde jusqu'au port de
Bassens.

 

 

 

De tous les bateaux commerciaux, bateaux de guerre ou paquebots qui ont mouillé dans les ports de l'estuaire, le plus long n'a pas dépassé 240 m, excepté le Norway cet été au Verdon.

La remontée de l'estuaire de la Gironde, dans lequel se mêlent les eaux de la Dordogne et de la Garonne, est en effet périlleuse pour celui qui ne sait pas localiser avec précision les bancs de sable, les courants et les endroits où les niveaux d'eau sont particulièrement bas.

Ce jour-là, Alain Lejeune va piloter le bateau polonais sur une centaine de kilomètres jusqu'au port de Bassens, à Bordeaux. Il ne prévoit pas d'être à quai avant la fin de la finale France-Brésil. Mais il est à cet instant bien loin de l'événement sportif. "Je ne suis pas un passionné de foot, précise-t-il. C'est pour moi beaucoup plus excitant de piloter l'énorme engin qui m'attend au large."

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Alain Lejeune, très attentif à l'évolution du bateau, reste la plupart du temps silencieux

 

 

Si la traversée est "excitante", elle est aussi stressante pour le pilote qui doit faire preuve d'une concentration sans faille et assister le commandant montre en main.

Le navire doit se présenter à Bassens avant l'étal, le moment où le niveau de la mer est stable, entre le flux et le jusant. L'équipage n'aura qu'une demi-heure pour accoster avant le début de la marée descendante.

L'étape la plus sportive : l'embarquement sur le navire

 "Dans l'estuaire, il faut toujours être au bon moment au bon endroit, explique Alain Lejeune. Il n'est pas rare que la marée commence à redescendre seulement quelques minutes après la pleine mer. Et lorsque le bateau est soumis à la résistance des courants du jusant, la manœuvre devient très compliquée. Mais il ne faut pas non plus être trop en avance, car le plein flot de la marée montante risque de pousser le navire trop loin et de rendre son arrêt plus difficile."

Le pilote doit connaître l'évolution des ensablements des sols marins, régulièrement soumis à des sondages, l'emplacement des bouées et les secrets des manœuvres sur n'importe quel navire.

Un candidat au poste de pilotage doit avoir moins de 35 ans, être titulaire d'un brevet de commandement, et avoir navigué au long cours 72 mois. Le pilote alterne une semaine de service, 24h/24, pendant laquelle il ne dort que quelques heures entre deux marées, et une semaine de congé.

Ce 12 juillet, le temps est au beau fixe, la houle la plus haute ne dépasse pas deux mètres, mais il faut néanmoins s'accrocher ferme à bord de la vedette.

Dans cette partie de l'estuaire, les courants traversent les eaux troubles chargées d'alluvions, de vase et de sable.

Les vagues, telles des pans de robes aux tons variant de l'ocre au rouille, enveloppent la vedette, se gonflent et se creusent.

"Attention aux nids de poule !", lance Alain Lejeune au capitaine de la vedette qui ralentit doucement.

Le pilote fixe son regard sur la coque du navire polonais, de plus en plus imposante à l'approche de la vedette.

Muni de son gilet de sauvetage, il s'apprête à effectuer l'étape la plus sportive de sa mission : l'embarquement sur le navire.

à suivre
Article paru dans le n° 36 du journal la Côte de Beauté. Suite dans le numéro 37 de novembre-décembre. Abonnements : L'Almanach - BP 23 - 86190 Vouillé. Bimestriel - 148 F/an. Tél. 05 49 51 80 48 -

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